Le voyage dans le temps est l’un des grands thèmes de la science fiction. Il nous fascine depuis toujours, que ce soit pour revivre le passé ou découvrir ce que le futur nous réserve.
Les jeux de société n’y ont pas échappé, BoardGameGeek recensant 1110 entrées (jeux et extensions) sur ce thème.
Voyage dans le temps et jeux de société
Les premiers jeux
D’après BoardGameGeek, The Time Machine est le jeu plus ancien sur le thème du voyage temporel. Il s’agit d’un jeu familial dans lequel les joueurs voyagent du XVIII au XXIème siècle pour collecter des cartes. The Time Machine sort en 1963, la même année que Doctor Who.
Trois ans plus tard, en 1966, The Time Tunnel Game est créé. Il se base sur une émission du même nom et propose de visiter 4 époques : la préhistoire, le moyen-âge, le présent et le futur. Le jeu s’adresse probablement aux petits garçons : la préhistoire n’est peuplée que de dinosaures, le moyen-âge/présent de guerriers, et le futur d’étranges machines aux lignes courbes.
Le premier jeu dans l’univers de Doctor Who sort en 1980. On y suit les aventures du 4ème Docteur (Tom Baker) contre les Daleks, Cybermen et autres créatures.
Le jeu Retour vers le Futur de 1985 (l’année de sa sortie) ressemble à un jeu de l’oie. Il a été produit en Angleterre par une entreprise de gâteaux apéritifs. Marty McFly, en retard pour l’école, grimpe à bord de la voiture du Dr. Emmett Brown et arrive 30 ans en avance.
Plus étonnant, 221B Baker St.: Sherlock Holmes & the Time Machine, en 1996. Le célèbre détective et son compagnon prennent la machine d’H.G Wells et tentent de résoudre des crimes célèbres.
Etat des lieux du voyage temporel
Comment voyager ?
Les jeux de société ne disent pas toujours comment les personnages voyagent. La plupart du temps, ils nous mettent devant le fait accompli : ils voyagent, point. D’autres, souvent narratifs, décrivent les techniques utilisées.
Loop Inc est l’un des rares à faire le choix d’une machine « classique ». Les joueurs la construisent pendant la partie avant de passer au jour suivant.
Dans Steam Time, ils utilisent des dirigeables à vapeur gigantesques (3 par joueur).
Dans T.I.M.E Stories, le corps ne traverse pas réellement les époques. Les agents prennent place dans des caissons temporels et seul l’esprit est transféré (il se retrouve dans un réceptacle). Ainsi, dans Asylum, ils prennent le contrôle de fous en 1921. Ce contrôle ne semble pas total, puisqu’ils sont sujets aux problèmes de leur réceptacle : paranoïa, crises d’angoisse, cannibalisme, etc.
Parfois, les personnages n’utilisent pas de machine. Ils passent par des failles créées artificiellement ou non. C’est le cas d’Anachrony dans lequel des failles spatio-temporelles se sont ouvertes suite à un cataclysme.
Dans quel but ?
Contrairement aux films, les personnages de jeux de société œuvrent rarement pour une noble cause. Sauver le monde ? Très peu pour eux !
Anachrony tente d’éviter une nouvelle catastrophe planétaire, mais le monde est déchiré par la lutte de pouvoir des différentes factions (Harmonie, Dominance, Progrès et Salut). Il en est de même pour Steam Time et sa course entre les nations qui cherchent à être les premiers à retrouver des connaissances, des cultures ou des trésors perdus.
La soif de gloire ou de reconnaissance est souvent exploitée : dans Paléon, les joueurs incarnent des paléontologues qui veulent monter les échelons dans la Société Paléontologique ; dans Temporum, ils tentent d’être les premiers à prendre le contrôle du présent ; dans Khronos, les seigneurs médiévaux cherchent à maintenir et étendre leur pouvoir.
Dans Loop Inc, les personnages n’ont qu’un but : gagner le plus d’argent possible.
Seul Tragedy Looper semble faire exception, les joueurs souhaitant empêcher un crime.
Quels scientifiques ?
Les jeux de société n’ont pas de savant (fou) travaillant seul à l’élaboration d’une machine.
La plupart du temps, les scientifiques sont regroupés et travaillent dans de grosses entreprises : Loop Inc, l’agence T.I.M.E., F.L.O.W., etc. Les joueurs incarnent des employés et utilisent les créations de ces savants pour se déplacer. Certains d’entre eux peuvent être vus en arrière plan du QG de T.I.M.E. Stories, travaillant sur les caissons ou les consoles de commandes.
L’action de Khronos se déroulant au Moyen-Age, ce sont les membres de la guilde des horlogers qui ont découvert le voyage dans le temps.
Quelle période ?
Les voyageurs vont dans le passé ou le futur, mais les réalités ne sont pas toujours exactes. Temporum et ses manipulations peuvent ainsi conduire à un âge des chats ou à une décharge nucléaire. T.I.M.E. Stories ajoute quelques éléments fantastiques comme les zombies.
La préhistoire est une période souvent utilisée. Dans Escape from 100 Million BC, les joueurs tentent d’en repartir sans se faire manger par un dinosaure ou brûler par la lave d’un volcan.
Lorsqu’il n’est pas question de grande période historique, les joueurs se retrouvent dans un futur ou un passé proche. Dans Anachrony, par exemple, ils remontent de quelques tours. Loop Inc voit la même journée se répéter plusieurs fois et Tragedy Looper, sans être daté, ressemble à notre présent.
Le « présent » n’est pas forcément celui du joueur : T.I.M.E Stories le situe dans notre futur et Khronos dans notre passé.
Quels risques ?
Parmi les risques liés au voyage dans le temps, le plus important est celui du paradoxe. Khronos se déroule simultanément sur 3 époques et se base sur la pose de tuiles. Les joueurs doivent construire 3 types de bâtiments (civils, religieux et militaires). Comme il est possible de construire des bâtiments alors que d’autres existent au même emplacement à une époque plus tardive, les paradoxes sont loin d’être rares.
La création de doubles est liée au paradoxe. La mécanique de Loop Inc tourne entièrement autour de ce concept : une partie se joue en 3 jours (3 fois le même jour). Le premier, les joueurs réalisent leurs actions, puis retournent dans le passé. Le second, ils existent en deux exemplaires et le troisième en trois. Ils doivent donc refaire les anciennes actions en plus de leurs nouvelles, sous peine de créer un paradoxe.
Timelock est un jeu pour deux joueurs : un personnage et son double. Ils s’affrontent en face à face, l’un souhaitant garder sa place, l’autre la lui prendre.
Escape from 100 Million BC traite du risque de rester bloqué dans une autre époque, les joueurs cherchant à reconstruire leur navire le plus rapidement possible.
Étonnamment, les boucles temporelles ne posent aucun problème. Aucun joueur ne se retrouve pris contre son grès dans une journée sans fin. Il s’agit plutôt d’un moyen de parvenir à son but (Loop Inc / Anachrony ) ou d’un sablier (Tragedy Looper / T.I.M.E Stories).
Deux jeux en détail
Tragedy Looper
Tragedy Looper est un jeu de déduction dans lequel l’un des joueurs prend le rôle de maître du jeu. Les autres sont appelés « protagonistes« . Ce maître du jeu, le « Mastermind« , tente de faire échouer les protagonistes.
Tragedy Looper est basé sur un système de scénarios que seul le Mastermind connaît (et comme il ne souhaite pas la paix dans le monde…). Au début du jeu, les protagonistes ne savent rien, si ce n’est qu’ils doivent sauver le monde. Chaque scénario est composé d’un certain nombre de boucles, elles mêmes composées d’un certain nombre de jours. Tout repose sur la défaite : un meurtre signifie la fin d’une boucle, mais c’est aussi la meilleure façon de comprendre ce qu’il se passe.
Le plateau est découpé en 4 lieux : Hôpital, Sanctuaire, Centre-ville et Lycée. Les personnages, représentés par des cartes, sont disposés sur ces différents endroits. Chaque personnage a un rôle différent en fonction du scénario (personnage-clef, tueur en série, etc). Ils peuvent aussi sombrer dans la paranoïa ou aider les protagonistes sous certaines conditions.
Mastermind et protagonistes ont chacun leur deck de cartes. Ils peuvent monter ou descendre le niveau de paranoïa, monter ou descendre le niveau de faveur, mais aussi déplacer des personnages.
Le Mastermind joue 3 cartes face cachée. Il peut les poser sur des personnages ou sur des lieux. Puis chaque protagoniste joue 1 carte de la même manière (à 4 joueurs). Les cartes sont ensuite résolue simultanément. La mort d’un personnage peut, suivant son rôle, signifier la fin d’une boucle. Dans ce cas, tout reprend à 0.
Il faut y ajouter des incidents certains jours. Leur résolution dépend de différents facteurs, comme le nombre de marqueurs paranoïa sur le coupable.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, Tragedy Looper est un jeu très mécanique. Il se base entièrement sur la déduction et, dans une certains mesure, sur le bluff. Le thème, dur, n’est clairement pas fait pour des enfants.
C’est un jeu exigeant qui demande quelques parties pour être réellement maîtrisé.
T.I.M.E Stories
Sur le papier, T.I.M.E Stories ressemble à Tragedy Looper : de la coopération, des boucles temporelles, des cartes et des scénarios. Première différence : tous les joueurs sont ensemble. Seconde différence : la mécanique ne prime pas.
T.I.M.E Stories est un jeu contemplatif et narratif dont l’illustrateur change à chaque extension. Lorsque les joueurs entrent dans un lieu, ils prennent les cartes correspondante et les disposent les unes à la suite des autres pour former un paysage. Ils placent ensuite leur pion sur le morceau de paysage qu’ils veulent visiter et regardent le dos de la carte. Ils peuvent discuter avec des personnages, acheter des objets ou déclencher des situations spéciales (certaines demandent de faire des choix). Ils peuvent aussi se battre (à coup de dés) ou résoudre des énigmes. Pour faire la comparaison avec le jeu vidéo, T.I.M.E Stories me fait penser à un point’n click.
Les joueurs ont un temps limité dans le passé. Les actions et les déplacement prennent du temps, matérialisé par une piste et un dé. Quand ils arrivent à 0, leur esprit retournent au présent. Ils reçoivent des informations supplémentaires et repartent une nouvelle fois dans le passé.
Une partie se fait en moyenne en 3 « run » : une première visite et deux retours. T.I.M.E Stories intègre aussi un système de points pour calculer son score.