Des jeux made in France et écoresponsables est une conférence qui a eu lieu pendant le Festival des Jeux de Cannes 2018.
Elle était animée par Gaëtan Beaujannot (Forgenext).
Avec la participation de :
- Florent Toscano, fondateur et gérant des Jeux Opla. Sa démarche d’éco-fabrication est en place depuis la création de son entreprise en 2011. Opla est un éditeur de jeux de société « classiques » (1 à 2 jeux par an), mais aussi sur commande (pour des ONG ou des entreprises).
- Michael Rambeau, responsable développement de la société Bioviva. Bioviva existe depuis 1996 et compte une 100ène de jeux. Ils sont fabriqués de manière éco-responsable depuis sa création.
Une démarche citoyenne
Fabriquer des jeux en France a un impact non-négligeable sur l’économie locale. Michael Rambeau compte une 40ène de nouveaux emplois : 20 chez Bioviva et 20 à 25 dans la Drôme. Pour lui comme pour Florent Toscano, fabriquer en France permet d’agir concrètement sur les choses.
L’Etat aide les zones de revitalisation rurale (ZRR) grâce à des dérogations fiscales. Les ZRR sont des communes peu denses et fragiles sur le plan économique. La Drôme en compte près de 200. Pour Michael Rambeau, l’éco-conception ne favorise pas un dossier vis à vis d’un autre dans ce genre de démarche.
Florent Toscano précise ce qu’il entend par « local » : il s’agit de la France, dans un rayon de moins de 1 000 km. Les matières voyagent par camion et non par tanker. Pour lui, c’est ce qu’il y a de plus propre… ou de moins sale.
Les éléments de ses jeux ne sont pas tous fabriqués au même endroit.
Pour l’Empereur, par exemple, ils y a 6 fabricants différents. Les manchots sont créés dans le Jura par un tourneur. Florent Toscano s’est rendu sur place et a pu assister à la chaine de création : des arbres de Lons le Saunier à la zone de traitement 20km plus loin, pour finir de nouveau 20km plus loin à la scierie. Il filme et diffuse en direct ses visites sur sa page Facebook.
Le 5 février, il a notamment été dans l’usine de Cartonnages de Vaucanson à Romans-sur-Isère pour montrer la fabrication et le matériel de Poc !. Son live Facebook a fait plus de 2 600 vues.
Les labels
Pour Florent Toscano, le côté local prend le pas sur un process de fabrication « green ».
En France, la plupart des imprimeurs possèdent un label propre comme le label Imprim’Vert. Imprim’Vert est un label créé en 1998, qui compte aujourd’hui plus de 2000 adhérents (soit plus de 60% des imprimeurs). Il se base sur plusieurs critères : la gestion des déchets et liquides dangereux, la non-utilisation de produits toxiques, la sensibilisation à l’environnement et le suivi de la consommation énergétique.
Le papier peut être PEFC ou FSC. Ce sont les deux grands labels internationaux de certification du bois.
PEFC est un acronyme pour « Programme for the Endorsement of Forest Certification schemes ». Il a été créé en 1999 avant de devenir un système mondial en 2001.
FSC correspond à « Forest Stewardship Council ». Il a été créé en 1993 (initialement pour la préservation des forêts tropicales) et sa branche française en 2007.
FSC impose à la forêt un niveau de qualité, tandis que PEFC demande une amélioration continue par les exploitants. Il est différent suivant les pays ou les régions, là ou FSC possède un standard international. Il n’est pas possible d’afficher les deux label à la fois.
Pour Florent Toscano, FSC est le moins pire des deux. Il rappelle que le côté « propre » des jeux a beau être mis en avant, ils sont simplement moins sales.
Les produits Bioviva sont tous labellisés Origine France Garantie. Ce label, créé en 2010, certifie qu’un produit est fabriqué en France à plus de 50% de son prix de revient unitaire.
Florent Toscano rappelle que le seul label valable est Origine France Garantie. Ses produits le l’ont pas, mais il possède tout de même le label « Lyon ville équitable et durable ». Ce label a été lancé en 2010 pour mettre en avant des entreprises, des commerces, des associations, des artisans et des lieux qui pratiquent le développement durable.
Florent Toscano s’est aussi créé son propre label, une carte de France qui reprend la localisation de chaque intervenant dans la création d’un jeu. Pour lui, le meilleur label est le public lui même.
Choix et fabrication des jeux
L’éco-conception implique une certaine adaptation lors du choix et de la création du jeu.
Si un jeu n’est pas faisable de cette manière, Florent Toscano et Michael Rambeau préfèrent abandonner le projet. Michael Rambeau prend comme exemple un jeu sur le thème du hérisson qu’il n’a pas pu faire. Le hérisson était représenté sous forme d’une boule de scratch qu’il fallait lancer pour attraper toutes sortes d’éléments (feuilles, champignons, etc). Le problème, c’est qu’il n’est pas possible, pour le moment, de concevoir un scratch de manière écoresponsable.
Les jeux sont tous ou presque entourés d’un blister. II est impossible de fabriquer du blister de manière éco-responsable tout en gardant sa transparence et sa brillance. Si il n’y a pas d’autre solution, Michael Rambeau met du blister autour de ses jeux. Il a tout de même réussi à s’en passer sur sa gamme Défis Nature en fermant simplement les boîtes avec une étiquette.
Fabriquer local à l'international
Ce que Florent Toscano aime dans la fabrication locale, c’est l’idée que les acheteurs fabriquent potentiellement eux même leur jeu. Il n’exporte pas très loin et préfère trouver des partenaires pour fabriquer les jeux dans le pays ou ils sont vendus. Le contrat précise qu’ils doivent le faire de manière éco-responsable.
Florent Toscano et Michael Rambeau rappellent que le maître mot dans leur démarche est la cohérence : les valeurs transmissent par les jeux se doivent de correspondre à la manière de les fabriquer.
Pour Michael Rambeau, ce qui est compliqué dans la recherche de partenaires à l’étranger, c’est de ne pas être sur place. Lors de la certification d’une usine, tout est beau, et il est difficile de savoir si il s’agit ou non d’une façade. Il faut prendre son temps, mais il n’est pas rare de rater une opportunité faute d’information.
Florent Toscano précise qu’il a déjà dit non à de gros partenariats qui ne correspondent pas à sa démarche sur le plan éthique. Dans certains pays comme le Canada, il n’en a aucun. Il y a récemment rencontré un distributeur qui est stupéfait par sa demande et va tenter de mettre en place la même démarche.
Michael Rambeau et Florent Toscano parlent ensuite des Etats-Unis. Bioviva n’y est pas présent. Opla a réussi à faire fabriquer l’un de ses jeux à Phoenix de façon éco-friendly. Mais ce partenariat ne concerne que ce jeu et il ne sera pas reconduit pour d’autres.
Pour Michael Rambeau, il y a deux approches possibles pour se lancer dans l’export :
- Soit vendre de petites quantités pour lancer le marché, et se dire qu’à terme les jeux seront produits sur place. Il s’agit de sa propre démarche.
- Soit trouver directement un partenaire qui produira de grosses quantités sur place. Il s’agit de la démarche de Florent Toscano.
La fabrication en France implique de serrer les marges pour rester compétitif avec l’Europe de l’Est ou la Chine au niveau du prix des jeux. La compensation se fait sur les volumes en produisant en plus grandes quantités. Pour Michael Rambeau, la bataille ne se fait pas à armes égales, mais le « Made in France » est perçu dans le monde comme un gage de qualité.
Gaëtan Beaujannot parle des paliers à l’International pour commencer à avoir des prix intéressants : exorbitants en dessous de 3 000 exemplaires, correcst à partir de 5 000. La fabrication en France fonctionne aussi sur ce genre de paliers. Florent Toscano précise tout de même que le chiffre dépend des éléments et qu’il ne change pas grand chose sur le bois. Michael Rambeau annonce qu’il s’applique sur tout ce qui est cartonnage et cartes. Dans l’impression, le prix de 3 000 exemplaires commence à être cohérent et 5 000 correct, mais il fait parfois des tirages beaucoup plus haut : 10 000, 20 000.
Florent Toscano explique que, lorsqu’un nouveau jeu sort, il l’imprime en 5 000 exemplaires et en profite pour faire 5 000 d’un autre, 3000 d’un autre, et 3000 d’un autre. Il sort ainsi 15-16 000 jeux d’un coup.
Gaëtan Beaujannot se pose la question de la réactivité des impressions en France par rapport à la Chine. En Chine, on compte généralement 12 semaines du lancement à la réception du jeu.
En cas de besoin, Michael Rambeau peut imprimer en 1 mois, avec des délais normaux à 2/3 mois.
Pour Florent Toscano, tout dépend de l’usine. Elles ont un planning et doivent honorer d’autres commandes. Il compte entre 4 et 8 semaines.
Le plus long n’est pas l’impression, mais l’approvisionnement en papier qui peut prendre jusqu’à 8 semaines. Michael Rambeau fait la différence entre du papier sur stock (des délais très courts, mais un prix plus important) ou sur fabrication.
Florent Toscano précise que le plus gros avantage de la France lorsque les délais sont serrés (comme un salon) et qu’une machine est en panne, c’est de pouvoir se débrouiller au dernier moment. Si ils ont besoin de 300 boites, ils les auront. Elles seront simplement fabriquées sur une autre machine et il pourra les récupérer dans la journée.
Public et distribution
D’après Michael Rambeau, le public est sensible à cette démarche d’éco-conception locale, mais ce n’est pas ce qui fait vendre. Il faut aussi créer de bons jeux et les mettre au bon prix.
Michael Rambeau et Florent Toscano ont 2 gammes de jeux assez différentes : très famille pour Bioviva et plutôt gamer léger pour Opla. Les jeux de Florent Toscano sont plus présents en boutiques spécialisées que ceux de Michael Rambeau. Dans ce genre de magasin, la démarche est appréciée, mais elle ne prime pas dans l’achat d’un jeu.
Elle donne malgré tout une image plus saine du marché et permet de toucher d’autres secteurs. Le public touché par les jeux Opla ne connait pas forcément les jeux modernes et découvre ce milieu.
Deux gros salons dans lesquels Opla a un stand se tiennent actuellement : Cannes et Primevère à Lyon. Primevère est un salon sur la nature, le bio, et le développement durable. Les visiteurs sont surpris de découvrir des jeux avec des thématiques qui leur parlent.
Malgré des thématiques scientifiques validés par des experts, le côté éducatif n’est pas le but premier de ces jeux. Les gens sont attirés par le thème et sont amenés au jeu de société par ce biais.
La démarche de distribution des jeux Opla est un peu spéciale : Florent Toscano passe par Paille Editions pour les boutiques spécialisées et fait le reste lui même dans les réseaux bio et alternatifs. Bioviva s’auto distribue totalement, que ce soit auprès des magasins ou des Biocoop. Certaines implantations peuvent être surprenantes, comme les sites touristiques ou les parcs animaliers. Bioviva compte une 20ène de personnes, dont 4/5 au service commercial, 4/5 à la création, etc. Comme tout est fait en interne, sa structure est forcément plus lourde. Par contre, il ne distribue que sa propre marque et ne pourrait pas faire autrement.
Pour Florent Toscano, développer l’image de sa propre société pour présenter au public quelque chose qui correspond à ses valeurs est déjà compliqué. Il se contente, comme Bioviva, de distribuer uniquement ses produits.
Pour Florent Toscano, le public est important. Il va dans les usines et filme en direct afin de lui montrer de manière transparente ou chaque pièce est fabriquée. Il prend comme exemple les sous-blocs de Poc! faits à Saint Dié dans les Vosges ou le livret à Brive-la-Gaillarde en Corrèze. Il parle ensuite de Hop la Bille et de ses billes en terre pour souligner la difficulté de trouver des usines : les dernières billes en terre d’Europe sont fabriquées dans le Limousin par Yves Renou. Le carré de tissus de 80 sur 80 a aussi posé beaucoup de soucis. Le jeu est finalement très cher à produire.
Il doit faire preuve d’astuces et créer des jeux avec le même matériel pour pouvoir les rééditer lors de la sortie d’un nouveau jeu. Michael Rambeau fonctionne de la même manière avec 5/6 formats différents.
Le prix des jeux écoresponsables
Une personne du public se demande quelle est la différence de coût entre un jeu « classique » et un jeu éco-conçu. Michael Rambeau rappelle que la quantité permet de s’y retrouver, mais que la différence avec la Chine peut être de 50%.
Gaëtan Beaujannot donne quelques informations techniques : il faut multiplier le coût de fabrication par 6 pour avoir un prix public. La différence de coût avec la Chine revient à 3 euros plus cher environ pour un coût de 50 centimes. Michael Rambeau explique que c’est cette problématique de marge qui les oblige à s’auto-distribuer. Il ne peut pas prendre un distributeur, surtout sur la France qui représente 80% de son chiffre d’affaire.
Mr. Guillaume de Tric Trac se demande si le public ne serait pas prêt à payer plus cher ce type de jeu. Il parle d’une expérimentation faite sur une bouteille de jus de pomme et une bouteille de lait. Une question a été posée aux gens : jusqu’ou sont-ils prêts à payer pour chaque maillon de la chaine ? Chacun a annoncé « j’ai besoin de tant pour vivre », et au final, les chiffres du public n’étaient pas si haut. En annonçant clairement un chiffre, il n’est plus possible de jouer sur les marges.
C’est une question compliquée, et après avoir répondu « non », Florent Toscano revient sur ses mots et avoue qu’il n’en sait rien. Il se demande, tout comme Michael Rambeau, si ils ne se mettent pas un frein. Florent Toscano explique tout de même que si plus plus d’usines savaient faire les éléments des jeux, les prix seraient moins élevés. Actuellement, les usines le font de manière ponctuelle et anecdotique. Le public doit donc jouer le jeu, mais tout n’est pas entre ses mains.
Michael Rambeau se demande si communiquer de cette manière sur le prix ne diluerait pas le discours en ne mettant pas en avant la qualité du jeu lui même. Fabriquer en France permet de créer des emplois et met en place un cercle vertueux.
Florent Toscano rappelle que ce n’est pas la fabrication propre qui distingue un jeu d’un autre en boutique spécialisée. Les gens viennent y chercher un jeu pour ce qu’il est et non pas pour ce qu’il y a autour. Par contre, c’est un plus pour les autres réseaux de distribution.
Une personne du public demande si le coût est la raison pour laquelle ces jeux éco-conçus sont de petits jeux. Florent Toscano répond par l’affirmative et Gaëtan Beaujannot prend l’exemple de Rallyman, un jeu de course de voitures de Jean-Christophe Bouvier. Son premier tirage lui a coûté 17 euros (+ thermoformage). Le jeu ne comportait pas énormément de matériel et il n’a pas eu le choix des voitures en plastique ou des couleurs. Un jeu avec ce type de matériel vaut entre 30 et 35 euros, mais si on multiplie 17 par 6…
Il était vendu aux alentours de 40/45 euros et n’aurait pas été possible sans auto-distribution.
Florent Toscano précise certains éléments : dans un circuit habituel, un jeu à 15 euros en boutique est vendu à 7 euros 50 HT par le distributeur. Le distributeur prend 30%, l’éditeur lui vend donc le jeu à 5,25 euros. Lorsque le jeu coûte 2 euros, l’éditeur a une marge de 3,25 euros (il arrondit à 3 euros pour que le calcul soit plus simple). Il faut payer l’auteur, l’illustrateur, les frais usuels de la société, le standiste, le transport, les animateurs , le voyage, les salaires, les charges de l’entreprise… avec 3 euros.
Une personne du public se demande si ce ne serait pas plus simple d’éditer uniquement le plateau pour un gros jeu, étant donné qu’un jeu de ce type s’adresse à des experts qui possèdent déjà plusieurs boîtes. Ils pourraient récupérer les pions et jetons sur d’autres jeux, ce qui réduirait le coût. Michael Rambeau trouve l’idée intéressante, mais ne sait pas si les joueurs auront forcément les bonnes pièces. Florent Toscano trouve que la tendance actuelle est à l’inverse, avec des jeux regorgeant de matériel et de plastique.
Michael Rambeau rebondit sur l’existence de plastique bio, mais précise qu’il est plus cher que le plastique issu de la pétrochimie directe.
Pour Florent Toscano, la solution est simple : éditer des jeux pour « gamer » avec peu de matériel, comme Apocalypse au zoo de Carson City. Il s’agit d’un tout petit jeu de 66 cartes pour une 12ènes d’euros et une 15ènes de minutes de jeu. Les gros joueurs ne sont pas son public-cible, et Florent Toscano ne s’attendait pas à ce que ce jeu leur plaise.
Michael Rambeau rappelle qu’un gros joueur peut très bien jouer à de petits jeux et qu’il ne faut pas cloisonner le public.
Un matériel et qualité
Une personne du public demande si la fabrication du plastique est impossible en France. Michael Rambeau lui répond par la négative. Il est tout à fait possible de faire du plastique et le plastique éco-conçu est en train d’émerger. Mais pour le moment les prix sont trop élevés. Il faut donc faire preuve s’astuce en récupérant des moules et en les réutilisant. Pour lui, le gros avantage du plastique (notamment avec les thermoformage) est sa réutilisation.
Le façonnage et le travail humain coûtent cher en France. L’idéal est de l’éviter dans la conception de son produit. Il prend comme exemple des dés vierges sur lesquels les enfants collent eux même des stickers.
Pour Florent Toscano, les joueurs ont maintenant l’habitude d’avoir des jeux de qualité. Il ne peut donc pas se permettre de proposer une qualité inférieure à ce qu’il est possible de produire en Chine.
L'accompagnement des partenaires
Gaëtan Beaujannot demande à Florent Toscano et Michael Rambeau si ils accompagnent leurs usines pour trouver de nouveaux partenariats dans le monde du jeu.
Michael Rambeau l’a déjà proposé à son partenaire principal, mais ça n’a pas donné grand chose et il s’est plutôt diversifié vers les étiquettes de vin.
Florent Toscano parle de certains de ses partenaires :
- Son fabriquant de boîtes fait du cartonnage de luxe et son plus gros client est SentoSphère, un éditeur de jeux et de loisirs créatifs. Ils fabriquent entre 1,5 et 2 millions de boites par an dans l’entreprise.
- Son fabriquant de cartes, France Cartes, a envoyé une personne sur le salon pour proposer ses services.
- Les tourneurs avec qui il travaille dans le Jura ont déjà beaucoup de travail, notamment par la fabrication de souvenirs.
Boutiques et autres réseaux de distribution
Mr. Guillaume de Tric Trac parle des boutiques spécialisées et du rythme d’édition soutenu qu’il faut avoir pour que la boutique n’oublie pas l’éditeur et continue de lui commander des boîtes.
Avec plus de 1000 nouveaux jeux par an, les boutiques ne peuvent pas tout garder. Pour Florent Toscano, l’idéal est d’avoir des jeux qui restent. Dans son cas, il s’agit du Bois des Couadsous, un petit jeu de cartes et de mémoire de Blaise Muller.
Mais les boutiques spécialisées ne sont pas l’unique lieu de vente de ses jeux.
À Cannes, par exemple, il ramène des nouveautés (Poc! et Apocalypse au zoo de Carson City cette année). Au salon Primevère de Lyon, d’autres jeux sont mis en avant. Il en est de même pour les parcs animalier, les magasins bio, etc. Contrairement au monde du jeu, si une référence marche, elle continue d’être vendue. Des jeux introuvables en boutiques peuvent encore y être acheté, grâce au thème et à la fabrication propre en France.
Michael Rambeau confirme : les Défis Nature existent depuis une 10ène d’années (3 à l’époque, 35 actuellement). La multiplicité des canaux de distribution permet de tenir le rythme et de produire tous les ans. Il travaille dans le Jeu depuis 15 ans et est étonné du nombre énorme de sorties et de la vitesse à laquelle les produits vivent et meurent. Les siens tiennent généralement sur 3 à 5 tirages.
Florent Toscano a pris le parti de ne tuer aucun jeu et de les laisser pérennes quel que soit le volume. Il découvre parfois de nouveaux réseaux de distribution qui correspondent parfaitement à un jeu peu vendu. Il trouve que le milieu du jeu est parfois trop centré sur lui même. Toucher un public non-joueur avec un jeu permet de faire vivre le jeu lui même, mais aussi l’ensemble des jeux.
Le curseur d'engagement
Une personne du public se pose la question du curseur d’engagement sur la démarche d’éco-conception. Il parle notamment du Scorpion Masqué qui met un logo « pour x boites vendues, un arbre est planté ».
Pour Michael Rambeau, c’est une question d’engagement. La démarche peut se faire sur plusieurs niveaux, comme les labels. Bioviva labellise tous ses jeux. Il a aussi lancé une action de soutiens, BioViva for Life, pour offrir des jeux aux enfants réfugiés. Pour lui, lorsqu’on est fier de ce que l’on fait, le curseur est bon.
Florent Toscano n’a pas de curseur précis, il place la barre à un certain niveau et tente de s’y maintenir.
Le projet de Florent Toscano
Florent Toscano a un projet depuis 5/6 ans qu’il repousse régulièrement. Les Jeux Opla sont situés à Lyon et sont très présents dans l’économie locale Lyonnaise. Ils ont le label « Lyon ville équitable et durable » et sont adhérents à la monnaie locale (la Gonette).
Des amis à lui ont lancé une BD qui s’appelle « Les rues de Lyon ». Les rues de Lyon est une revue en 12 pages (1 par mois), qui raconte une anecdote de l’histoire Lyonnaise (contemporaine ou passée). La revue est faite par un auteur de BD, illustrée par un auteur ou un illustrateur Lyonnais et imprimé à Lyon. Elle est vendue 3 euros en point de vente ou sur abonnement. Sur ces 3 euros, 1 euro est pour les auteurs, 1 euro pour le revendeur, et 1 euro pour l’association qui s’occupe de la fabrication.
Florent Toscano voudrait faire la même chose dans le jeu de société avec 2 jeux dans l’année : un en juin et un en décembre. Leur prix serait de 8/9 euros pour un petit format. Lyon ayant un patrimoine très riche, le thème ne poserait pas de problème. Le jeu serait fait par un auteur Lyonnais, illustré par un illustrateur Lyonnais et fabriqué dans le Grand Lyon.
Economiquement, le jeu serait très différent de ce qu’il se fait actuellement. Pour un jeu à 9 euros, le prix hors taxe est de 7,50 euros. Sur ces 7, 50 euros, il y aurait 2,50 euros pour le revendeur, 2, 50 pour l’éditeur et 2,50 pour les créateurs (1,25 euros pour l’auteur et 1,25 euros pour l’illustrateur).
Gaëtan Beaujannot donne une idée des prix dans le jeu de société : pour un jeu à 10 euros, sur la marge de 3,50 de l’éditeur, un auteur touche 6%, soit 17 centimes.
Florent Toscano aimerait lancer son projet pour 2019. C’est un projet qui lui tient à coeur. Le jeu serait vendu sur le modèle économique dont il a parlé dans le Grand Lyon et de manière plus classique dans le reste de la France.
Il passera probablement par le financement participatif (Ulule pour le côté français).
Une réponse à “Des jeux made in France et écoresponsables”
Fantastique, merci pour la transcription (un boulot de dingue !)